En Côte d’Ivoire, selon l’enquête PMA de l’année 2020, 230.000 avortements sont pratiqués chaque année. Ce chiffre représente 4% des femmes en âge de procréer, (15-49 ans). De plus, 6 sur 10 de ces avortements sont à risque, car impliquant des méthodes peu conventionnelles et non recommandées.
Et pourtant, la loi ivoirienne interdit la pratique de l’avortement sauf en cas de viol et lorsque la vie de la mère est menacée. Ce cadre restrictif censé réduire cette pratique à sa plus simple expression, a plutôt eu pour conséquence de faire prospérer les avortements clandestins avec tous les risques encourus et leurs lots de décès.
Face à ce tableau assez sombre sur la situation de l’avortement, l’Association des Femmes Juristes de Côte d’Ivoire (AFJCI), la Société de Gynécologie et Obstétrique de Côte d’Ivoire (SOGOCI) et la Coalition » Action contre les Grossesses non Désirées et à Risques » (AGnDR), profitant de la célébration de la Journée Internationale du Droit à l’Avortement, commémorée le 28 septembre de chaque année, ont réaffirmé leur ferme engagement en faveur du droit des femmes à l’autonomie corporelle, à la santé reproductive et au choix en matière de procréation.
Lors d’une conférence de presse, tenue ce jeudi 28 septembre à la Maison de la Presse au Plateau, ‘AFJCI, représentée par Maître Agathe Blanc, juriste et chargée de projet au sein de cette association et Maître Rogatienne Boni, juriste et membre de l’AGnDR, ont réitéré aux autorités ivoiriennes leur projet intitulé » Tous Ensemble pour l’avortement sécurisé en Côte d’Ivoire ». Elles ont conformément au thème de cette journée internationale à savoir » Ensemble faisons entendre nos voix et affirmons que l’IVG est un droit humain essentiel pour garantir l’égalité, la dignité et la liberté des femmes », encouragé l’Etat ivoirien, à tout mettre en œuvre pour favoriser les conditions de l’avortement sécurisé. Un plaidoyer qui, selon elles, ne fera que renforcer non seulement les principes des droits de l’Homme et de l’égalité des sexes dans notre pays, mais aussi faire reculer les avortements clandestins qui causent énormément de dégâts dans le milieu des femmes et des jeunes filles, s’il est accueilli favorablement par les décideurs.
Ces trois organisations ont également profité de l’occasion pour appeler l’Etat ivoirien au respect strict du protocole de Maputo, notamment sur ses six principaux points, qui élargissent les conditions d’accès aux services d’avortement. » La Côte d’Ivoire en ratifiant le protocole de Maputo, s’est engagée à protéger et à promouvoir les droits des femmes en matière de santé reproductive y compris le droit à l’avortement sécurisé. Cet engagement est en ligne avec les principes des droits de l’Homme et de l’égalité des sexes », a déclaré maître Agathe Blanc, chargée de projet à l’AFJCI.
Cependant, ces organisations militant en faveur des droits des femmes, restent convaincues que la mise en œuvre d’un projet touchant à un thème aussi délicat que l’avortement, ne peut se faire de façon aisée face aux pesanteurs socio-culturelles et religieuses qui constituent de réels obstacles. » La stigmatisation sociale et l’accès limité aux services de santé reproductive sont autant d’obstacles qui persistent. L’AFJCI et la SOGOCI appellent donc à une action concertée pour faire respecter les droits des femmes en veillant à ce que les lois et les politiques protègent leur liberté de choix et leur dignité. Ensuite, élargir l’accès à des services de santé reproductive sûrs, afin de prévenir les risques pour la santé des femmes, éduquer la société sur les réalités de l’avortement pour lutter contre la stigmatisation et la désinformation, et soutenir les femmes dans leur parcours de soins d’avortement, en garantissant un accès non discriminatoire à des services de qualité », ont-elles plaidé.
Au-delà des obstacles qui pourraient se dresser sur leur chemin dans l’exaucement de leurs voeux, c’est-à-dire, la mise en œuvre de l’avortement sécurisé, ces trois associations gardent la foi en un » avenir où chaque femme pourra prendre des décisions éclairées sur sa santé et son corps, sans crainte ni discrimination ».
Mais pour l’heure, l’avortement demeure puni par la loi.
Wassimagnon